Thierry Parienty : « Un budget prudent pour ne pas courir de risques »
À peine « la saison du Covid » terminée, les Boxers de Bordeaux se sont remis au travail pour se projeter sur une nouvelle année et sur un nouveau projet dans lequel les jeunes joueurs prendront plus de place. Le président Thierry Parienty fait le point sur la situation économique du club qui a plutôt bien traversé cette période grâce au soutien de tous, et sur l’avenir dont les contours sont dessinés mais des incertitudes liées à la crise sanitaire planent encore…
La situation financière après 2 années d’efforts était assainie quand cette saison 2020-2021 très particulière a débuté. Le dernier exercice a-t-il remis en question ce rétablissement ?
« Il a fallu s’adapter constamment. Effectivement, nous avons eu moins de recettes, donc plus de difficultés, mais il y a eu aussi moins de dépenses. Est-ce que malgré les aides et tout ce qui a été mis en place, on a replongé dans une grande difficulté ? La réponse est non. Alors oui, c’est une année qui a cassé la dynamique de redressement et on va probablement finir en déficit. Je n’ai pas encore tous les chiffres à ma disposition mais ce sera un déficit contrôlé qui n’aura rien à voir avec ce qui c’était passé il y a 3 ans et qui ne met absolument pas en danger l’existence du club. Tout cela a été rendu possible parce que nous avons pu compter sur le soutien des institutions, des partenaires-entreprises, des abonnés et des actionnaires. C’est grâce à tout ce beau monde qui aime le club et qui a la volonté d’avancer »
Est-ce que de cette situation sur le plan financier découle un budget prévisionnel en baisse pour la saison prochaine ?
« Le budget sera inférieur aux années précédentes mais ce n’est pas lié à la saison que nous venons de passer. L’année prochaine, nous aurons un budget prudent, pas pour gérer des problèmes mais pour ne pas courir de risques. Je m’explique. Quand on commence une saison, habituellement, on connaît un certain nombre de paramètres comme le nombre d’abonnés, le potentiel des partenaires-entreprises, … Pour la saison prochaine, on ne connaît pas ces recettes potentielles. On s’applique donc une dose de prudence pour éviter de courir trop de risques. Nous aurons donc une équipe compétitive, qui sera plus jeune, qui nous permettra d’avoir une autre philosophie de jeu, que nous assumerons. Elle sera aussi ambitieuse. Mais nous ne prendrons pas de risques car il y a trop d’incertitudes… On ne sait pas si le public pourra revenir, on ne sait pas si les abonnés pourront renouveler leur abonnement, on ne sait pas si les partenaires-entreprises pourront venir. Autant de questions sans réponses précises à l’heure où on se parle et cela ne nous permet pas de prendre de risques. Avec les acquis de l’expérience passée, nous serons sages mais ambitieux »
J’imagine que vous avez cependant quelques certitudes…
« Nous avons aussi de bonnes nouvelles. Nous avons des partenaires qui restent dont certains investissent un peu plus, nous avons une fidélité des abonnés tout aussi forte. Nous pouvons donc nous appuyer là-dessus mais nous ne dépenserons pas l’argent avant de l’avoir gagné. Ce qui est différent des autres saisons car quand on fait un budget au mois de Mai, on n’a pas encore commencé et c’est donc un budget prévisionnel »
Concernant les partenaires-entreprises, avez-vous cependant une vision assez précises de ce qui se fera la saison prochaine ?
« Nous avons un taux de fidélité de l’ordre de 92% de la part des partenaires qui se sont engagés. D’une manière générale, les partenaires-entreprises répondent présent, ils aiment leur club au même titre que d’autres personnes, et c’est important de pouvoir compter sur eux »
Concernant les abonnés, que se passe-t-il alors qu’ils n’ont pas pu bénéficier des prestations prévues et ont été privés d’une partie importante des matchs ?
« Cela se passe bien. Un gros travail a été fait par Alex, JB et Arthur. Tous les abonnés ont eu des contacts individuels avec ces trois personnes, par mail ou par téléphone. On leur a présenté le plan de fin de saison tenant compte des conséquences de la crise sanitaire. C’est d’une grande importance pour nous. La fidélité, le partage, marchent dans les deux sens. C’est pourquoi, dans les propositions que nous avons faites à nos abonnés, on ne pouvait prolonger ou se projeter sur la prochaine saison car nous n’avons aucune certitude sur l’accueil du public. Il leur était donc possible soit de faire don de tout ou partie de ce qu’ils n’avaient pas utilisé soit de demander le remboursement des matchs fermés au public. Les résultats sont les suivants : en gros, on a 60% de nos abonnés qui ont demandé un remboursement, et 40% qui font don au club des prestations qu’ils n’ont pas eues. Ce travail qui a été fait nous a permis aussi de nous rapprocher de nos abonnés, d’échanger avec eux, ce qui est extrêmement positif. Leur fidélité n’a pas été entachée et il était important que la confiance qu’ils nous font se poursuive. D’ailleurs, la plupart de ceux qui ont demandé le remboursement l’ont fait en s’engageant à se réabonner la saison prochaine »
Avec ces données, avez-vous une vision du potentiel d’abonnés la saison prochaine ?
« Nous n’avons pas lancé la campagne d’abonnements, il nous est donc impossible de faire une projection. Et compte-tenu du contexte, nous n’avons pas d’expérience. Sortie de pandémie, comment le public va réagir, faut-il ou non être vacciné, rien de tout cela n’était déjà arrivé. D’où notre niveau de prudence sur le budget »
Parlons de l’effectif, si vous le voulez bien. Une nouvelle politique a été mise en place, en mettant l’accent plus fortement qu’avant sur les jeunes joueurs, ce qui était déjà dans l’air dans le club. Pouvez-vous nous en parler ?
« C’est dans l’ADN de beaucoup de gens de promotionner les jeunes parce que c’est intéressant, c’est gratifiant. Sauf que, c’était dans l’air, c’était en place pour certains, mais ce n’était pas la ligne directrice majeure, ce qui est maintenant le cas. Il est nécessaire, et c’est peut-être une des conséquences du Covid, de redonner plus de vie, plus d’âme, plus de lien, de pouvoir montrer qu’effectivement on a des U17 et des U20 Élite, que nous avons des jeunes qui font des efforts pour rejoindre l’équipe professionnelle et que nous devons leur donner leur chance. Alors c’est vrai que le fait de promotionner les jeunes, ça coûte aussi moins cher, en tout cas en théorie par rapport à des gens plutôt confirmés. Donc s’il y a une raison économique dans cette orientation, ce n’est pas celle qui a primé. Ce qui a compté c’est que, quand on traverse une crise, il est important de se recentrer sur ses propres valeurs, de pouvoir mettre en avant ce que l’on fait tout allant chercher des jeunes à l’extérieur pour les développer. Cela a été initié précédemment et on a eu de bons exemples comme Jules Lefebvre et Jules Gallet, mais là on souhaite aller plus loin. C’est aussi une des raisons pour laquelle nous avions porté notre choix sur Olivier Dimet et sur son staff, avec une présence de Julien Desrosiers chez les jeunes et dans le staff pro pour qu’il y ait une véritable colonne vertébrale sportive »
Est-ce que cela signifie que les Boxers de Bordeaux vont se la jouer plus modeste en termes d’ambition ?
« Je pense qu’il faut laisser mûrir les jeunes, leur donner leur chance. Ils vont se tromper, ils feront des erreurs comme nous en faisons. Nous devons les soutenir et les développer. Il faut peut-être faire preuve d’un peu plus d’humilité parce qu’il faut laisser du temps pour que le travail paye, et en même temps il faut que nous soyons respectés avec des victoires. Nous voulons donc développer les jeunes, nous voulons qu’ils comprennent la valeur travail, qu’il y ait un véritable esprit d’équipe, qu’ils aiment le maillot. Nous tenons à les encadrer avec des joueurs plus matures, qui ont cette volonté de partager, d’aider, de développer, et qui adhèrent à ce projet, avec pour seul but de tirer le groupe vers le haut. Cela explique nos choix sportifs et notre stratégie de recrutement. Les objectifs et les résultats viendront en conséquence de ces valeurs-là. Nous repartons en ayant bien les deux pieds au sol »
Vous fixez-vous d’ores et déjà un objectif sur le plan sportif ?
« L’objectif c’est de pouvoir, sans pression, se qualifier pour les playoffs. Et aller le plus loin possible en coupe »
Dernière question, peut-on dire aujourd’hui que tous les clubs de Synerglace Ligue Magnus sont obligés de réduire un peu la voile ?
« Il y a des gens qui dirigent bien leur club et qui ont introduit un certain niveau de prudence dans leurs choix parce qu’il y a beaucoup d’incertitudes. Il peut y avoir sur 1 ou 2 clubs des facilités de recrutement parce qu’ils ont plus de ressources et qu’ils veulent jouer le titre. Leur prise de risques est différente parce qu’ils ont une assiette financière qui le leur permet. Mais de manière générale, je pense qu’il y a aura une prudence naturelle »
Propos recueillis par Claude Canellas