L’héritage familial de Loïk Poudrier

D’aussi loin qu’il se souvienne Loïk Poudrier n’a jamais pensé qu’au hockey, un authentique héritage familial. « Quand on est nés mon frère, ma soeur et moi, nous étions baignés dans le hockey« , dit aujourd’hui le n°27 des Boxers de Bordeaux, grand frère du n°27 de l’Hormadi Anglet, Pierre-Maxime, et fils de l’ancien n°27 des deux clubs néo-aquitains et de l’équipe de France, Serge Poudrier. « Pour nous, c’est un peu un destin tracé mais c’est aussi une passion et le fait d’en vivre sur les traces de mon père, c’est magnifique !« , reconnaît le joueur Bordelais.

Encore haut comme 3 pommes, Loïk Poudrier ne vivait que pour le hockey. Il collectionnait les cartes de joueurs et allait avec son frère dans le vestiaire à la rencontre des joueurs, mais les visites se sont raréfiées « parce qu’à chaque fois on demandait des crosses aux joueurs et on en avait près d’une vingtaine dans notre chambre !« , reconnaît celui qui a également toujours regardé depuis cette époque les matchs de NHL à la télévision même si cela lui a été rendu plus difficile aujourd’hui avec le décalage horaire. « Enfant, je jouais dès qu’il y avait une balle qui traînait. Je prenais une petite crosse que mon père me mettait dans les mains« , se souvient-il. Loïk Poudrier ignore encore aujourd’hui pourquoi son père s’est toujours opposé à ce qu’il tienne la crosse du même côté que lui. « Du coup je suis gaucher par défaut, pour le hockey uniquement et c’est pareil pour mon frère« .

A 3 ans, alors que Serge Poudrier jouait à Rouen, le petit Loïk recevait les visiteurs en jouant au hockey sur ses patins à roulettes autour de la table du salon avec une adresse déjà remarquable et sous le regard affectueux de ses parents. Invariablement, il mettait une cassette vidéo dans le magnétoscope, pas pour se délecter de dessins animés comme l’auraient fait nombre d’enfants de son âge, mais bien pour donner à voir du hockey et surtout des images de son père en train de travailler ! « Mon père était mon modèle. Et sa passion à lui venait aussi de mon grand-père qui était coach de hockey. Mon oncle a aussi un peu joué en ligue nationale (LNH) avec les Nordiques« , souligne Loïk né à Thetford Mines au Québec où se situe la maison familiale. « Je ne sais pas si c’est calculé mais mon frère et ma sœur sont aussi nés l’été au Québec. En mai 1994 pour mon frère, en juin 1998 pour ma sœur et en juillet 1992 pour moi. Les 3 années où mon père a participé aux Jeux Olympiques avec l’équipe de France. C’est magique !« , note l’ancien Angloy.

Serge Poudrier, connu sous le surnom de « Pou », a écumé les patinoires européennes durant 18 ans, 10 années en France (4 titres avec Rouen), 2 ans en Allemagne et 6 ans en Suisse (1 titre avec Lausanne) avant de retourner au Québec terminer sa brillante carrière à Thetford Mines où vient de lui être rendu hommage au cours d’une soirée où a été retiré le chandail n°27. Il a également disputé 7 championnats du monde et 3 Jeux Olympiques sous le maillot tricolore. Déjà occupé à coacher les jeunes, il vient depuis cette saison de prendre le poste de head coach de l’Assurancia de Thetford Mines, club évoluant en Ligue Nord-Américaine de Hockey (LNAH) où évoluait Félix Petit l’année dernière.  Ce modèle patriarcal ne saurait s’amender du rôle joué par la maman, Nathalie, qui a su à la fois épauler Serge et élever ses enfants. « Ma mère a sacrifié un peu sa carrière professionnelle pour celle de mon père et avec 3 enfants, il ne lui était pas possible de travailler. Elle courait les patinoires et elle gérait la maison durant les voyages de mon père« , dit Loïk Poudrier avec tendresse.

Enfant, celui qui était surnommé la tornade tant, selon lui, il « déplaçait de l’air », ne laissait du répit à sa maman que lorsqu’il faisait la sieste avec son père tous les après-midi en période de compétition. « Elle a eu beaucoup de patience« , dit-il, soulignant que les Poudrier sont une famille très unie. « On passe 9 mois sur 12 éloignés les uns des autres mais on garde le contact. Et c’est toujours une joie de se retrouver l’été« , avoue-t-il. L’été au Québec, c’est l’occasion aussi pour lui de pratiquer d’autres sports. Ou presque. « Honnêtement, j’essaie de me mettre un peu au golf l’été avec mes copains. Mais c’est dur techniquement et je ne suis pas très bon, mais je me débrouille« , dit-il.

Loïk Poudrier était plus doué en milieu scolaire même si ce n’était pas toujours facile en raison des changements de ville au gré de la carrière du papa, ce qui l’obligeait non seulement à changer d’établissement mais aussi à se trouver de nouveaux amis. Il est cependant parvenu à « s’ouvrir une porte » dans l’immobilier pour l’avenir. « J’ai fait des études d’agent immobilier. J’ai fait la moitié mais j’ai arrêté du fait de ma carrière de hockeyeur. C’est un diplôme qu’on obtient au Québec en 3 ans. J’ai un an et dermi d’effectué. Je pourrai toujours faire une année et demie de remise à niveau et passer l’examen« , indique l’attaquant franco-canadien.

Cette carrière professionnelle a débuté en Suisse à l’âge de 21 ans où une opportunité s’est offerte à lui dès son hockey junior terminé. Il a préféré une forme  de stabilité en Europe aux incertitudes de la East Cost League (ECHL) où il avait quelques possibilités de se lancer. Une nouvelle vie et un pas à franchir. « On était seuls pour la première fois avec ma femme« , une Québecoise rencontrée il y a 8 ans, avec laquelle il est désormais marié pour le meilleur depuis l’été dernier. « En Europe, il a fallu s’adapter. Mais on a pris la piqûre. On adore la culture européenne« , témoigne-t-il. Après 3 saisons en LNB ou LNA suisses, il franchit la frontière et rejoint l’Hormadi Anglet, là où son père avait ses débuts en Europe.

Outre son titre de champion junior à 19 ans acquis en remportant la Coupe Memorial, finale des 3 ligues juniors du Canada, c’est au Pays-Basque qu’il a connu l’une de ses plus grande joie de sportif en remportant le titre de champion de D1 et la montée en Ligue Magnus. « Le fait d’être champion, c’est l’aboutissement d’une saison d’efforts. Ce n’est comparable à rien d’autre« , avoue-t-il. Et après 3 saisons il a choisi de rejoindre les Boxers de Bordeaux….comme papa ! « Je ne crois pas que c’était la fin d’un cycle mais pour moi on avait réussi à maintenir le club en Ligue Magnus l’année dernière et Bordeaux a toujours été une opportunité possible avec Philippe Bozon. Et le fait qu’Olivier Dimet soit venu ici a aussi compté. Mais c’était surtout le timing parfait. J’avais aussi besoin de nouveaux objectifs. Il n’y a pas le même budget à Bordeaux qu’à Anglet. Oui je me plaisais à l’Hormadi mais j’avais aussi envie de sortir un peu de cette zone de confort, de relever de nouveaux challenges« , dit pour expliquer son choix.

C’est encore une remise en question qui l’attendait sur le plan personnel. « Au début ça a été difficile d’arriver dans une grande agglomération. On partait d’une petite ville. Mais maintenant on a nos repères, ma femme travaille, on se plaît bien ici. Honnêtement on adore. On a visité la ville mais on n’en a pas fait le tour, il y a tellement de choses à faire ! Dans la région, je n’ai pas trop bougé. On est allé à Saint-Emilion, Arcachon. De toute façon même quand on était à Anglet on venait à Bordeaux quand on avait 1 ou 2 jours de repos« , souligne le natif de Thetford-Mines. A Bordeaux il a commencé à se construire une nouvelle vie. Ainsi, avec son épousée, Loïk Poudrier s’astreint mais sans forcer sa nature, à aller au cinéma 1 fois par mois. « C’est tellement facile d’avoir accès à des films à la maison ! Moi j’aime aller dans la salle avec mes petits pop-corns, et le fait de vivre le film un peu avant tout le monde. Le dernier film que j’ai vu, c’est le nouveau Spider-Man. J’aime un peu tous les genres. Je me prends à aimer des films d’amoureux, des bons vieux classiques comme « Dirty Dancing »que je regarde avec ma femme« .

Ce qui ne l’empêche pas de regarder des séries télévisées, sujet de discussion dans le vestiaire des hockeyeurs qui se partagent les bons tuyaux. « Ça donne envie de tout voir. J’ai terminé récemment « 13 reasons why » et j’ai aussi regardé la fin de « Breaking Bad« . Le Franco-canadien avoue également adorer la lecture et plus spécialement les biographies. « La dernière que j’ai terminé c’est la bio d’Elon Musk, le patron de Tesla (Sud-Africain naturalié canadien puis américain), de Paypal et de SpaceX. J’essaye d’apprendre de leur parcours, parfois partis de rien« , souligne l’attaquant bordelais. La musique fait également partie de son univers au point qu’il a essayé de se mettre à la guitare. « Mes parents m’en avaient acheté une pour l’été. Jai essayé mais c’est une catastrophe tellement c’est difficile. J’ai essayé de regarder des vidéos sur Youtube mais c’est trop technique. J’ai l’habitude de tenir une crosse, pas une guitare (rires)!« , s’amuse-t-il.

En amateur de la cuisine française il aime aller au restaurant mais les petits plats préparés par madame le régalent. « Le petit plus ici c’est que les bouteilles de vin sont moins chères. Le vin, on essaye de mieux le comprendre. On a visité des châteaux, on nous a expliqué comment on fait le vin, on a fait des dégustations. Mais un athlète de haut niveau ne peut pas trop boire« , souligne le nouveau girondin. Il dit ne pas trop penser à l’avenir, souligne que c’est Bordeaux qu’il a dans la tête, qu’il veut s’améliorer dans cet environnement et donner le maximum dans « cette organisation » et devant ce public. « On est choyés de vivre ici« , reconnaît-il. Alors l’heure a peut-être sonné de donner un petit-fils ou une petite-fille à Nathalie et Serge. « C’est vrai, on a un projet d’enfant. Très prochainement. Mais maintenant il s’agit de penser au fourneau !« , sourit-il. Et comme il n’y a pas de hasard, à Bordeaux Danaelle travaille dans une boutique pour enfants…

Claude Canellas