Julian Junca, un pur produit Catalan

Le gardien n°2 des Boxers de Bordeaux Julian Junca est un pur produit Catalan. Fils d’un Espagnol et d’une Française, agriculteurs à Puigcerdà, petite ville frontalière Espagnole de moins de 10.000 habitants, il a fait son école primaire et ses premières années de collège à Bourg-Madame, de l’autre côté de la frontière. Il possède la double nationalité Française et Espagnole, parle le Français, l’Espagnol et le Catalan. C’est à Puigcerdà qu’il a embrassé le hockey et c’est à Briançon qu’il a fait ses classes durant 5 ans avant de rejoindre Grenoble puis Bordeaux cette année. L’état civil a retenu que Julian Junca est né il y a 21 ans à Prades (Pyrénées-Orientales). C’est là en effet où se trouvait la maternité la plus proche de Puigcerdà, à 60 kilomètres de là, juste de l’autre côté de la frontière, où sa famille cultive des céréales (blé, seigle…) et élève en moyenne une quinzaine de chevaux bretons principalement pour la protection de la race et sa reproduction, et sur une exploitation qui s’est transmise de père en fils depuis plusieurs générations. « Ce sont deux activités complémentaires. Quand les juments sont en estives, on peut moissonner et vice-versa. C’est de l’agriculture classique, en fonction des cycles naturels« , indique Julian, fier de ses origines.

Sa maman est de Ur, petite commune située côté Français à quelques kilomètres de la ferme familiale où le backup des Boxers a grandi au côté de sa sœur aujourd’hui âgée de 19 ans, laquelle étudie l’agronomie à Pau, dont la proximité avec Bordeaux facilite les retrouvailles régulières. C’est donc côté Français qu’il est allé à l’école par la volonté de ses parents. Il n’a pas eu à faire beaucoup de kilomètres puisque c’est à Bourg-Madame, commune jouxtant Puigcerdà, seulement séparées par le tracé de la frontière, à une soixantaine de kilomètres de la Principauté d’Andorre. « Mes parents voulaient que j’aille à l’école en France. J’y ai fait ma primaire et les 6ème et 5ème au collège avant de partir à Briançon pour le hockey où j’ai poursuivi jusqu’à obtenir un bac STMG (Sciences et techniques du management et de la gestion)« , raconte l’ancien Grenoblois. C’est donc à Puigcerdà qu’il a chaussé les patins pour la première fois. « Quand j’étais petit ma mère voulait que je fasse du sport et elle m’a fait essayer le hockey. Et ça m’a plus tout de suite. Je n’ai donc pas essayé de faire d’autre sport alors qu’en Catalogne, le sport populaire côté espagnol est le foot et côté français le rugby. Le hockey, c’était assez logique, la patinoire est juste à côté de chez moi« , souligne le n°33 des Boxers de Bordeaux.

C’est dans un club bien structuré qu’il a fait ses premières gammes et ses premiers games, le CG Puigcerdà dont l’équipe première vient de terminer deuxième de la saison régulière en Super Liga espagnole, et a été 5 fois champion d’Espagne, 4 fois vice-champion et a gagné 10 Copa del Rey. « Gamin, j’avais la passion. Je collectionnais tous les Hockey Magazine et les Slapshot Magazine. Quand je suis devenu gardien, j’ai pris pour modèle Cristobal Huet. J’avais des posters de lui dans ma chambre. Je me suis retrouvé à jouer gardien de but le jour où on manquait de gardien dans mon équipe. J’avais entre 6 et 7 ans. C’était à mon tour d’essayer. Et après avoir joué, le coach a dit : « c’est lui et pas un autre ». Du coup je suis resté dans la cage et j’ai adoré ça tout de suite« , se souvient le goalie. Il avait une dizaine d’années lorsqu’il participa à deux tournois sous le maillot de Toulouse-Blagnac à qui il manquait un gardien. Le premier était le Tournoi NHL de Tours, et le deuxième le Trophée des petits champions organisé chaque année à Briançon, Gap et Orcières-Merlette où son équipe parvenait en quart de finale. De leur côté les Diables Rouges de Briançon qui étaient en panne de gardien l’engagèrent, après autorisation de l’organisation, pour la suite du tournoi qu’ils terminèrent en finale.

Un concours de circonstances, lié à son talent naissant, lui ouvrit des portes qu’il franchira ensuite sans avoir à les enfoncer. « Grâce à ce tournoi je suis resté en contact avec Briançon. Ils voulaient que je les rejoigne l’année suivante mais j’étais trop jeune, je ne voulais pas partir de chez papa-maman, et de toute façon ma mère y était opposée. Mais un an plus tard j’ai finalement rejoint Briançon. J’avais alors 13 ans. Quand je suis arrivé dans ce club, l’équipe pro dont le coach était Luciano Basile était au top niveau. J’y suis resté 5 ans. J’en ai gardé plein de bons souvenirs« , avoue le backup bordelais. Et il y a de quoi. A 14 ans il intégrait les U18 et à 16 ans terminait vice-champion de France U18 Elite, battu en finale par Grenoble. L’année suivante, il avait à peine 17 ans, il allait disputer 7 matchs de Saxoprint Ligue Magnus en janvier 2016 tout en participant à la Coupe de la Ligue avec les Diables Rouges !

Ses 18 ans fêtés, il prenait la direction de Grenoble. « Dès que j’ai eu mon bac, j’ai accepté la proposition de Grenoble dont on peut dire qu’ils ont l’un des meilleurs centres de formation en France. Il n’y avait meilleur endroit pour finir mes deux dernières années junior« , assure-t-il. Ce bon choix lui permettait de terminer dès sa première saison vice-champion de France U20 Elite. Puis il poursuivait chez les U20 des Brûleurs de Loups la saison suivante pour cette fois lever le trophée de champion de France tout en jouant en D2 avec les Grizzlys de Vaujany, l’équipe réserve grenobloise. « Durant cette période je n’ai jamais eu l’occasion de jouer avec les pros. J’ai fait du banc deux fois la première année mais je m’entraînais souvent en troisième gardien avec eux et donc avec Lukáš Horák ! On a beaucoup échangé sur les situations de jeu. Il m’a aidé à progresser. Hélas, à Grenoble, c’était bouché pour moi avec les pros. J’avais une proposition de Bordeaux, j’étais en contact avec Stephan Tartari, et j’ai décidé de partir après en avoir discuté avec les dirigeants des Brûleurs de Loups« , raconte le Catalan.

Depuis son arrivée l’été dernier pour jouer la doublure de Clément Fouquerel, Julian Junca a disputé 6 matchs comme titulaire. « C’est bien mais on veut toujours plus, c’est normal. Ça s’est plutôt bien passé mais on n’a gagné qu’un match sur les 6. J’aurais aimé avoir un peu plus de victoires« , reconnaît-il. Pour lui « venir à Bordeaux, c’était une évidence. Je venais de les voir jouer en playoffs contre Grenoble. Et ça faisait quelques années que ça jouait bien. Et puis la patinoire est belle, la ville est belle, ça me rapproche au moins d’1 heure à 1 heure et demie de chez moi, ce n’est pas négligeable. Je suis venu avec l’idée que j’allais m’entraîner avec une grosse équipe, pleine d’ambition. Et je ne suis pas déçu. Je m’entends bien avec tout le monde, le groupe vit très bien. Je suis venu ici dans l’idée de bien débuter ma carrière. Alors pourquoi ne pas la construire ici. Après, dans le sport, ça va super vite et on peut se retrouver en un rien de temps à l’autre bout de la France« , concède le talentueux gardien Bordelais qui rêve en bleu.

« L’Équipe de France, c’est super important. J’ai déjà fait un championnat du monde U18 et un championnat du monde U20 D1A en décembre 2017 (la France a terminé 4ème et lui troisième gardien de la compétition !). Porter le maillot de l’Équipe de France c’est une fierté. Ça peut ouvrir une vision sur l’étranger importante car il n’y a pas beaucoup de recruteurs qui viennent voir le championnat français« , dit le joueur qui s’est bien intégré dans sa nouvelle vie chez les pros, au point de passer du temps avec d’autres joueurs partageant ses centres d’intérêts comme les jeux vidéo (Fifa, NHL…etc), le cinéma où il va de temps en temps voir des films d’action ou des comédies avec Aziz Baazi. Julian Junca aime aussi les bouquins sur le sport, les bio sur les sportifs et notamment sur Léo Messi dont il est fan, Martin Fourcade ou encore Pep Guardiola, autant de sportifs de Catalogne.

Bien équilibré et en même temps bon vivant, il avoue aimer la « bonne bouffe ». Bien sûr en dehors des périodes de compétition. « J’aime les grandes tablées avec la famille et les amis. J’aime bien quand je rentre à la maison quand les mamies préparent de bonnes choses. En plus on a tout à la maison, des lapins, des poules, des canards… A Noël on a eu droit à un canard aux pruneaux !« , sourit-il. Loin de s’abandonner au moindre excès, affuté pour attaquer les playoffs, prêt à répondre à l’appel de la glace, Julian Junca poursuit son apprentissage chez les pros et s’affirme chaque jour un peu plus.

C.C.